Par Manon
À la fois amusante et follement attachante, la série Netflix Sex Education dépasse les attentes qui lui étaient attribuées. Laurie Nunn, la créatrice, parvient à lever le tabou sur la sexualité adolescente. En effet, encore très mal vue, la sexualité des collégiens, des lycéens et en particulier des jeunes filles reste encore et toujours tue par la société.

Cette série, sous couvert d’un voile de comédie haut en couleurs permet d’aborder tout en légèreté la sexualité des jeunes, que ce soit celle des hommes, des femmes, des indécis, des homosexuels comme des hétéros, en solitaire ou à plusieurs mais aussi de donner à voir un autre modèle que le couple hétérosexuel qui fait l’amour par amour. Le sexe chez les adolescents n’est pas bien différent que celui des adultes si ce n’est qu’il est inexpérimenté et bien souvent maladroit car mal orienté. En effet, le tabou entraîne une méconnaissance de ce domaine, d’un acte pourtant naturel, mais aussi de nos corps, ainsi que bien souvent une honte chez les femmes – le sexe étant alors considéré comme une chose sale, qui déshonore. Cette série brise ENFIN les tabous au cinéma en ne se gardant pas d’aborder, avec humour ou sérieux, toutes les différentes facettes du sujet – homosexualité, masturbation féminine, asexualité, relations sérieuses ou occasionnelles et basées sur le sexe, préliminaires, sexe gay ou lesbien, protection, agressions…
C’est une bouffée d’air frais de voir tant de sujets abordés alors que la société ne les reconnaît et ne les accepte toujours pas tous (en particulier la masturbation féminine, l’asexualité, le lesbianisme…). La série montre le sexe tel qu’il est : une chose pas toujours parfaite, qu’on n’enseigne pas et qu’on connaît encore trop mal, mais qui est quelque chose de positif et qui s’apprend; elle envoie un véritable message d’espoir : “Le sexe, ça se découvre. Plus on communique, plus on apprend, plus on kiffe !”. Cela va encore plus loin car la série a son propre site (sexeducation.fr) qui approfondit tous ces sujets : le consentement, l’attirance libre, les règles, la masturbation… Les créateurs de la série et même ses acteurs (en particulier Emma Mackey, qui interprète Maeve Wiley) se sentent tous concernés et impliqués dans cette action pour lever les tabous, cette revendication de liberté; Sex Education est devenu bien plus qu’une série, c’est un acte militant.
On pourra aussi souligner que bien que ce soit son sujet principal, la série libère plus que le sexe. Les femmes n’y sont pas systématiquement sexualisées, ni les hommes masculinisés : la série essaie de ne pas perpétuer des stéréotypes de genre, pourtant assez accrochés aux séries destinées aux adolescents. Sans cacher la difficulté que c’est de trouver sa place dans ce monde pour un jeune, elle insuffle à ses personnages un caractère unique, qui lui est propre et qui souvent casse les codes auxquels nous sommes habitués : le sportif vedette n’est pas si heureux qu’on pourrait le croire, la geek a un désir de sexualité débridé, le puceau connait le sexe mieux que ses camarades, les personnages hommes gays ne sont pas tous féminisés et inversement, le rebelle avec une grosse bite n’a pas confiance en lui et n’est pas strictement hétérosexuel… Cette série s’évertue à briser un par un tous les codes liés à la sexualité et aux genres, mais elle le fait avec une finesse et un naturel remarquables : les sujets tabous sont abordés comme ils sont, c’est-à-dire pas toujours assumés mais en évolution et la série montre qu’on a tous des complexes mais que pourtant tout ce qu’on aime, tout ce dont on a envie est normal et naturel.
La série s’est donc fixée plusieurs objectifs qui, je le pense, sont largement atteints : un discours libre qui cherche à décomplexer, aborder une vision LGBTQ+ du sexe et enseigner que le sexe et tout ce qui lui est lié n’est pas quelque chose dont on devrait avoir honte. En plus de tout cela elle se trouve être particulièrement divertissante, amusante et touchante. C’est un modèle à suivre pour les séries à venir !